Bank Run
Dans un environnement de hausse des taux sur le marché monétaire, certaines institutions bancaires à l’image de la Silicon Valley Bank ont dû faire face à la chute de leurs dépôts. Ces dernières ont alors été contraintes de générer des liquidités par la vente de titres dans des conditions moins favorables que lorsqu’elles les avaient acquis. Relançant les craintes de 2008, le risque de contagion à d’autres banques a fortement pesé sur les marchés financiers, et plus particulièrement sur le secteur bancaire. Face à la défiance des investisseurs, certaines d’entre elles ont vu leur valeur boursière chuter de plus de 50% en une séance. Si la mise en faillite de la Silicon Valley Bank a été prononcée, la rapide réaction des autorités américaines pour éviter la contagion a quelque peu apaisé les investisseurs, sans toutefois restaurer la pleine confiance. En effet, le Trésor américain, la FED ainsi que la FDIC ont conjointement convenu d’une garantie de l’accès aux dépôts, ainsi que de la mise en place d’un plan de prêt d’urgence d’un an que les banques peuvent solliciter en échange de collatéral. En parallèle, la défiance des investisseurs s’est tournée vers les banques européennes. En l’occurrence, Crédit Suisse, qui a longtemps été le maillon faible, a fait face à une chute de sa valorisation boursière ainsi qu’à une envolée de la prime de couverture contre son risque de défaut. La Banque nationale suisse ainsi que le régulateur se sont à leur tour efforcés de rassurer les investisseurs en rappelant que l’établissement respectait les exigences réglementaires, veillant à écarter le risque en provenance des banques américaines. Néanmoins, confrontée à une crise de confiance après la mise en faillite de ses consœurs américaines, Crédit Suisse fera l’objet d’une acquisition par sa concurrente UBS à la demande des autorités nationales. Somme toute, après de nombreux jours de turbulences, l’appétit pour le risque a fait son retour suite au rachat partiel des actifs de la Silicon Valley Bank par First Citizens Bank.
Au sein d’un contexte délicat, les discours des banquiers centraux ont ainsi été très attendus. L’institution européenne a décidé de ne pas s’éloigner de la trajectoire initialement tracée et de procéder à une hausse de 50 points de base de ses taux directeurs. Si la vigueur du phénomène inflationniste reste encore incompatible avec la cible des 2 %, il se pose désormais la question des perspectives. A ce sujet, Christine Lagarde précise que l’institution conservera son approche « data dependent » pour ses prochaines décisions. Quant à la Réserve Fédérale, elle reste prudente compte tenu du contexte en indiquant une hausse des taux directeurs de 25 points de base, les portant ainsi à 4,75 – 5 %. La devise, les taux souverains ainsi que les actifs risqués ont marqué le pas suite à cette annonce alors que J. Powell insistait sur l’incertitude qui prévalait. De surcroît, la normalisation des salaires et de l’emploi reste encore trop lente à ses yeux, et la vigueur de l’inflation continue de préoccuper.
Dans le cadre de sa dernière réunion à la tête de la Banque du Japon, Haruhiko Kuroda est quant à lui resté fidèle à sa stratégie ultra-accommodante. En outre, l’institution s’est même montrée plus prudente qu’attendu concernant l’activité économique, tout en rappelant que les pressions inflationnistes restaient largement importées. Pourtant, les hausses de salaires sont enclenchées, pouvant ainsi soutenir le pouvoir d’achat des ménages et alimenter les pressions inflationnistes à travers la demande domestique. Les chiffres de l’inflation japonaise ont dans ce cadre indiqué que le phénomène inflationniste était persistant, et qu’il pourrait éventuellement s’accélérer lors des prochains mois. Toutefois, il semblerait qu’un changement de cap soit progressivement en cours au sein de l’institution, laissant planer la volonté de réduire le caractère accommodant de la politique monétaire. Pour autant, un changement drastique n’est pas envisagé sur le court terme et les prochaines statistiques de hausses des salaires constitueront un point d’attention majeur.
Si le risque d’une crise bancaire est venu s’ajouter à la persistance de l’inflation, la mission des banquiers centraux qui doivent désormais composer avec de nouvelles variables devient ainsi plus délicate. Alors que la réactivité des autorités et le soutien public a apaisé la vision des investisseurs, la vigilance reste de mise dans un contexte de recherche de visibilité.